• 2 octobre 2025

    Marcher à Bourg-en-Bresse : promenade urbaine ou parcours du combattant pour les personnes à mobilité réduite ?

L’accessibilité à Bourg-en-Bresse : où en est-on ?

En 2024, la ville de Bourg-en-Bresse continue d’évoluer pour répondre aux exigences de la loi de 2005 sur l’égalité des droits et des chances. Mais quel est l’état des lieux côté trottoirs, places, passages et carrefours ?

  • Une ville à taille humaine, mais… : Bourg-en-Bresse profite de sa dimension modérée (41 785 habitants selon l’INSEE début 2023), facilitant en théorie l’aménagement progressif des espaces publics. Néanmoins, la topographie inégale et la présence d’un centre historique aux rues étroites compliquent l’adaptation des itinéraires pour tous.
  • Des audits d’accessibilité réguliers : Selon la mairie, 76 % des cheminements piétons de Bourg sont « conformes à l’accessibilité ». Cette statistique, issue du rapport d’étape 2023 sur le Schéma Directeur d’Accessibilité, montre une avancée certaine mais laisse un quart des circuits encore imparfaits, notamment pour franchir la gare, le quartier Brou ou autour du marché couvert.
  • Des investissements constants : Près de 2 millions d’euros ont été investis dans la voirie et les trottoirs pour l’accessibilité sur la période 2019-2023 (source : Ville de Bourg-en-Bresse). Les priorités affichées : baisser les trottoirs, poser des bandes podotactiles et élargir les accès aux arrêts de bus.

Point de vue des premiers concernés : avis, attentes et énigmes du quotidien

Pour comprendre l’adaptation réelle des itinéraires piétons, l’écoute de ceux qui les empruntent est précieuse. Voici un condensé de retours recueillis auprès d’associations locales comme l’APF France Handicap Ain–Bugey et le Collectif Accessibilité du bassin de Bourg-en-Bresse.

  • Pavés, racines, mobilier urbain : Les pavés du centre-ville historique rendent tout déplacement très sportif pour les fauteuils roulants. À cela s’ajoute le mobilier urbain parfois mal positionné : bancs trop proches des poubelles, panneaux de signalisation en travers du passage, bornes escamotables insuffisamment visibles.
  • Trottoirs et stationnements : L’occupation régulière des trottoirs par des voitures en stationnement « à la lyonnaise » (en partie sur le trottoir) bloque souvent le passage des personnes à mobilité réduite. La municipalité multiplie les rappels à l’ordre, mais la sensibilisation des automobilistes reste un défi permanent.
  • Traversées piétonnes : Beaucoup de traversées clés sont dotées de feu sonore et de guides podotactiles. Pourtant, aux abords du lycée Lalande ou vers le carrefour rue Charles Robin/rue Gambetta, certaines traversées présentent encore soit des ressauts de plus de 4 cm, soit l’absence de repère podotactile.
  • Feux sonores : pas partout : Si 90 % des carrefours principaux sont équipés de feux tricolores sonores, certains axes secondaires restent difficiles à franchir, notamment autour des quartiers périphériques.

Comment Bourg-en-Bresse se situe-t-elle par rapport à d’autres villes ?

L’accessibilité urbaine avance partout, mais avec des rythmes distincts. Un rapport de l’Association des Paralysés de France (APF France Handicap) de 2021 classait Bourg juste en-dessous de la moyenne nationale sur le critère « accessibilité voirie et espace public », avec une note de 12/20 (versus 13,5/20 pour les communes de taille équivalente).

  • Une avance sur certains points par rapport à Oyonnax et Mâcon (taux d’arrêt de bus accessibles plus élevé : 85 % à Bourg contre 60 % à Oyonnax, source Communauté d’agglomération du Bassin de Bourg-en-Bresse, 2023).
  • Des blocages typiques de villes historiques comparés à Villeurbanne ou Bron, Bourg souffre davantage de son bâti ancien, peu flexible aux restructurations majeures sans investissements lourds.
  • Participation citoyenne : Bourg-en-Bresse a expérimenté dès 2022 des balades urbaines “en situation de handicap” ouvertes au public, pour faire tester les itinéraires aux élus et techniciens, une démarche encore rare ailleurs (source : La Voix de l’Ain, novembre 2022).

Les initiatives récentes à Bourg-en-Bresse pour l’accessibilité

Au-delà des obligations réglementaires, on note des efforts ciblés ces deux dernières années :

  • Quai 136 et la Maison des Jeunes : Viennent d’être pleinement accessibles après travaux, tant via leur entrée que dans la circulation intérieure.
  • Le projet de la Plaine Tonkin : Lors de la rénovation du parc en 2023, tous les cheminements piétons ont été conçus pour une accessibilité complète aux PMR, avec revêtement lisse, pentes inférieures à 5 % et accès facilité aux aires de jeux et bancs.
  • En 2024, généralisation de l’application “Bourg City Guide” : Cette application recense en temps réel les obstacles temporaires (chantiers, marchés) et propose des alternatives adaptées à chaque profil, y compris aux PMR.
  • Chantiers à venir : Le plan voirie 2024-2026 prévoit la réfection de la totalité de la rue Victor-Basch, l’un des points noirs pointés par les usagers, avec élargissement des trottoirs et pose de bandes d’éveil.

Quels obstacles restent à relever ?

Malgré ces avancées, plusieurs défis majeurs demeurent :

  1. L’accessibilité universelle des commerces : Plus de 40 % des boutiques indépendantes du centre sont difficilement accessibles (chiffre Chambre de Commerce et d’Industrie de l’Ain, janvier 2024), notamment à cause de marches à l’entrée ou de l’absence de rampe mobile.
  2. L’encombrement des trottoirs : Les jours de marché, les étals débordent parfois hors des espaces autorisés, forçant les PMR à faire demi-tour ou marcher sur la chaussée (constat relayé par plusieurs associations locales).
  3. L’entretien des aménagements : Les trottoirs refaits il y a plus de 10 ans laissent parfois remonter des racines ou s’effritent, engendrant des micro-obstacles qui peuvent paraître anodins… jusqu’à la chute, comme en témoignent plusieurs personnes âgées auprès du journal Le Progrès, été 2023.

Témoignages et initiatives citoyennes

Certaines initiatives repoussent tout de même les frontières de l’engagement citoyen :

  • Le “Baromètre de l’accessibilité” : Créé en 2023 par un collectif d’usagers PMR, il compile les retours sur les entraves (photos, signalements, suggestions) et les transmet en mairie. Une carte collaborative commence à émerger sur Internet, permettant à chacun d’anticiper ses itinéraires (source : Collectif Accessibilité Bourg, page Facebook).
  • Journée “Marche et partage” : Organisée en septembre chaque année, cette journée propose à tous de parcourir la ville “autrement”, fauteuils et poussettes à disposition. L’édition 2023 a réuni près de 150 participants et permis de signaler 21 points d’amélioration immédiate.

Des pistes pour améliorer la situation à Bourg-en-Bresse

L’accessibilité des itinéraires piétons reste un chantier en évolution. Quelques recommandations issues de rapports, d’expériences de terrain et de bonnes pratiques repérées ailleurs pourraient inspirer la ville :

  • La multiplication de zones piétonnes continues : Supprimer au maximum la rupture de niveau (marches, ressauts), comme pratiqué à Dijon dans son centre piéton, améliore radicalement le confort.
  • L’entretien préventif : Un passage régulier pour contrôler racines, trous et dénivelés serait salutaire, à l’image du “plan trottoirs” lyonnais, qui a réduit de 30 % le nombre de chutes liées à des défauts de voirie (Ville de Lyon, rapport sécurité, 2022).
  • Sensibilisation renforcée : Campagnes d’affichage et d’intervention dans les écoles ou chez les commerçants pour rappeler la place des PMR sur l’espace public. C’est l’axe retenu par Nantes avec son opération “Mon trottoir, c’est pas un parking !”.
  • Soutien financier à la mise en accessibilité des petits commerces : Primes ou aides techniques pour installation de rampes d’accès, inspiration du programme “Bordeaux Accessible”.

Perspectives : faire de la ville un parcours sans obstacles

La question de l’accessibilité ne peut plus être traitée à la marge. Bourg-en-Bresse a engagé de nombreuses transformations, visibles parfois, discrètes souvent, dans le paysage quotidien des piétons. L’existence de diagnostics fréquents, l’écoute croissante des citoyens et la mobilisation associative témoignent d’une volonté forte d’aller de l’avant.

Mais pour que le centre-ville devienne vraiment un espace inclusif, le défi réside moins dans des opérations d’envergure que dans une attention de tous les instants : chaque micro-saut de trottoir, banc mal placé ou panneau invisible est un obstacle pour quelqu’un. À Bourg-en-Bresse, comme ailleurs, la ville idéale ne sera accessible à tous… que si elle l’est d’abord aux plus fragiles.

Chacun, à sa mesure, peut faire évoluer les usages – du conducteur qui gare sa voiture au commerçant qui installe une rampe, du marcheur vigilant au technicien qui choisit un revêtement. Ce sont ces gestes, ce maillage de décisions et de prises de conscience quotidiennes, qui dessinent une ville vraiment accueillante pour tous, mobilité réduite ou non.

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